Si le communisme modèle soviétique a fait faillite, le communisme demeure un courant bien vivant. Il vient de loin dans notre histoire. Il croise nombre des aspirations d'aujourd'hui. Être utile, dans le présent de l'action comme dans l'invention d'un nouvel avenir, c'est l'ambition de Robert Hue pour son parti. Cela implique des transformations profondes dans l'identité même du Parti communiste français, une mutation. Elle est déjà entreprise, il faut la mener à bien. Nouveau communisme, lecture du passé, ouverture et volonté constructives, rénovation du Parti : Robert Hue s'explique. En homme chaleureux, direct. À sa manière, faite de franchise et d'invitation au dialogue.
Corrompre est devenu, en Europe, un loto où l'on gagne le pactole neuf fois sur dix, en toute impunité. Les « affaires » qui secouent la France, l'Italie, l'Espagne, la Belgique ou l'Allemagne, ne sont que la partie émergée d'un iceberg de trafics en tout genre : recyclage de l'argent sale, commissions occultes, implantations mafieuses, fraude fiscale à grande échelle...
Face à cette criminalité financière, aux ramifications internationales, les magistrats sont enchaînés par des procédures archaïques et interminables. Leurs enquêtes s'arrêtent, immanquablement, aux portes des paradis fiscaux, qui pullulent jusqu'en Europe. Parce qu'ils profitent, souvent, de ces circuits illégaux pour leur financement, les « politiques » ne font rien pour aider les juges. Il arrive même, comme en France, que certains fassent tout pour les empêcher d'agir.
Sept hommes ont décidé de dire « non ». Sept juges en première ligne contre les voleurs de démocratie. Certains, à l'instar du Français Renaud Van Ruymbeke, prennent la parole pour la première fois. Avec une étonnante liberté de ton, ils se confient à Denis Robert. Et lancent un appel à tous les citoyens. Si la justice n'est pas appliquée avec la même rigueur pour tous, si le capitalisme laisse la corruption et l'argent sale envahir chacun de ses mécanismes, si la confiance des électeurs est durablement trahie, sans que personne ne réagisse, ce sera le chaos.
Depuis 1990, le monde est entré dans une ère nouvelle, marquée par la fin de la confrontation bipolaire Est Ouest, et la remise en cause de la stratégie nucléaire. De ce brusque passage, le conflit du Golfe fut la cérémonie guerrière, imprimant comme au fer rouge les nouveaux principes de domination. La promotion des États-Unis au rang - ambitionné depuis des millénaires par tous les empires universels - de « maîtres du monde », en est, apparemment, le pivot essentiel.
Cet essai novateur, nourri de documents exclusifs, issus du Sénat, de la Chambre des Représentants, et du Pentagone, remet en cause cette idée reçue. En réalité, les Américains se demandent si leur leadership militaire ne fait pas d'eux, plutôt, les simples mercenaires d'un pouvoir mondial, dominé économiquement par des pays qui, comme le Japon et l'Allemagne, s'interdisent toute action armée au-dehors.
Née d'une révolte contre la tyrannie, comme une utopie antimilitariste, aujourd'hui seule puissance militaire capable de régir l'avenir de l'humanité, la République d'Outre-Atlantique est-elle capable d'instaurer ce « nouvel ordre mondial » annoncé par le président Bush ? Ou, au contraire, son intervention démesurée - et inachevée - contre l'Irak, n'est-elle pas l'ébauche d'une gestion impériale qui nous promet une libanisation mondiale ?
Ce livre est dangereux : quand vous l'aurez reposé, vous ne regarderez plus la télévision, la radio, ou vos journaux de la même façon. Vous ne verrez plus les hommes politiques du même oeil. Vous ne signerez plus, comme avant, vos chèques à la caisse des hypermarchés, vos factures d'eau ou votre déclaration d'impôts. C'est un livre sur la politique. Des directeurs de cabinet, des porteurs de valises, des patrons, racontent l'engrenage et la propagation de la corruption. Urbanisme, énergie, commerce, communication : quand l'ombre obscurcit, à ce point, toutes décisions, la République a quelques raisons de trembler. C'est un livre sur l'argent. Celui qui achète les médias. Celui qui sort des caisses des entreprises, ou des poches des contribuables, pour s'évader vers des comptes inconnus via des paradis fiscaux. En privé, ils disent que c'est le capitalisme ; ou l'huile de l'économie. En public, ils nient, la main sur le coeur. Ce livre dit comment se trafique l'influence. C'est un livre sur la justice et ses coulisses : malgré les apparences, elle a rarement été autant entravée dans les affaires en cours, dès que celles-ci visent les liens financiers entre hommes publics et puissances privées. C'est un livre sur les médias. Portraits, anecdotes, choses vues et entendues, il témoigne du triomphe de la communication et du journalisme porte-serviette. Il décrit, derrière le rideau de fumée, la fabrication d'illusions collectives, la mécanique du mensonge.
Dans aucune autre nation occidentale, le pouvoir n'est concentré en si peu de mains. Finance, politique, médias, le mot d'ordre est unique : toujours plus, toujours pour les mêmes... À l'heure où Jacques Chirac veut moderniser la vie politique, et Lionel Jospin limiter le cumul des mandats, il était important de dresser un bilan complet du phénomène des cumulards dans notre pays : P.-D.G. des grandes entreprises, politiciens des villes et des campagnes, stars du journalisme et du monde intellectuel. Avec une sorte de rage démocratique, Pierre Bitoun collecte, chiffre, explique, s'insurge, polémique. Il propose des réformes, souvent radicales, toujours fondées sur la participation du plus grand nombre au choix de son destin.
Le 20 février 1998, le Conseil constitutionnel validait l'élection du député Jean Tiberi, tout en jugeant incontestable l'existence de fraudes graves dans l'établissement des listes électorales du Ve arrondissement de Paris. Pourquoi les listes du Ve sont-elles, deux ans après, toujours dans l'état où les avait trouvées le Conseil, gardien des lois de la République ? Comment des scrutins peuvent-ils se dérouler au coeur de Paris dans des conditions que chacun sait et reconnaît frauduleuses ? Comment les fraudes ont-elles été, à l'origine, identifiées ? Qu'est-ce qu'un faux électeur ? Autant de questions auxquelles Jean-Philippe Immarigeon, avocat, répond, tout en montrant que cette affaire n'est que le symptôme de la crise profonde que traverse notre démocratie parlementaire.
Du précédent ouvrage de Robert Hue, « Communisme : La mutation », on a surtout retenu le règlement de comptes, qu'opérait le secrétaire national du PCF avec le passé soviétique du communisme. Cette fois, il se tourne vers l'avenir, et invite à explorer un nouveau projet.
Car les temps ont changé. Très vite. La déferlante de l'ultralibéralisme semblait avoir tout submergé - et il apparaît, avec les multiples crises, que ce n'est pas si simple. Une époque nouvelle s'ouvre, avec ses réalités, ses enjeux, ses questions, ses aspirations. Rien n'est joué. Et le Parti communiste participe au gouvernement de la France, au sein de la « gauche plurielle ».
Robert Hue livre ici ses analyses, et propose d'ouvrir « Les chantiers » neufs d'un communisme de notre temps, d'une organisation communiste du XXIe siècle. Chaleureux et audacieux, convaincu que le débat est indispensable pour redonner à la politique la dimension de la volonté et l'ambition du projet, il nous y invite aujourd'hui.
Dans la ville en miettes, la société n'a plus de territoires où ancrer sa mémoire et recréer des espaces publics. Pourtant, ici et là, s'éveille un nouvel art de vivre lourd d'interrogations, mais aussi de promesses. À Paris, particulièrement dans le vingtième, émerge une nouvelle culture politique, qui prend appui sur l'esprit des lieux, rebelle et créatif. La municipalité d'arrondissement, élue en juin 1995, met en oeuvre une logique expérimentale qui inflige un démenti aux prophètes du déclin de la démocratie, comme aux zélateurs de la technocratie. L'efficacité de l'action publique ne repose pas seulement sur le raffinement des dispositifs et la progression des financements, mais aussi et d'abord, sur la capacité à mobiliser les énergies en amont des projets, à susciter une ingénierie du lien social et de l'action collective. Bref, à faire le pari de la démocratie locale. Mais le renouveau entrevu, ici comme ailleurs, reste fragile et les problèmes de société demeurent. Il faudra bien que l'évolution des pratiques et des mentalités gagne Paris, - et notre pays en entier, - où trois Français sur quatre sont des urbains.
C'est une lettre. Une lettre de Robert Hue aux jeunes. Il leur parle d'eux et de la politique. Une lettre qui commence ainsi : Tout est fait aujourd'hui pour vous détourner de la politique. D'ailleurs, la politique, souvent vous la rejetez. Et, en même temps, - je le sais parce que nombre d'entre vous me le disent -, vous en attendez beaucoup. Je pense, quant à moi qu'il n'y a pas de solution à vos problèmes et à ceux du pays sans politique. Mais pas la politique telle que vous la rejetez : une politique différente. Et, pour qu'elle soit différente, pour que vous puissiez avoir la certitude qu'elle est différente, un seul moyen : qu'elle passe par vous. Qu'elle se fasse avec vous et donc, bien sûr, pour vous. Comme elle devrait se faire avec et pour l'ensemble des citoyens. Il y a votre attente. Et il y a cette conception nouvelle que j'évoque. Ne pensez-vous pas qu'elles méritent de se rencontrer ? En fait, l'une ne va pas sans l'autre. Alors, il nous faut dialoguer. Oui, c'est cela : il faut qu'on se parle. Se parler pour, comme je le souhaite, nous entendre ! Comment faire ? Et bien, je commence. Je fais le premier pas. Je vous écris.
Le racisme est devenu une préoccupation quotidienne de tous les pays développés. Les émeutes de Grande-Bretagne, de sordides faits divers en France, les événements d'Afrique du Sud, ont fait brutalement prendre conscience à l'opinion occidentale d'une nouvelle forme de lutte des classes, opposant désormais les pauvres du Sud aux nantis du Nord. Aux États-Unis, après le tumulte des années soixante, le silence est retombé sur la communauté noire que l'Amérique blanche feint de croire domestiquée, sinon intégrée, Nicole Bernheim a enquêté dans la nouvelle bourgeoisie noire. Assimilés, blanchis, ces médecins, ces hommes d'affaires, ces journalistes ? L'auteur n'en croit rien. Tandis que les ghettos s'enfoncent dans la délinquance et la misère, l'impatience grandit dans une classe moyenne qui attend toujours sa part légitime de pouvoir. Poudrière potentielle, l'Amérique noire d'aujourd'hui doit donner à penser aux autres pays industrialisés. Car les Américains noirs ne retourneront pas plus sur la terre de leurs ancêtres, que les Maghrébins nés en France ou les Indo-Pakistanais de Grande-Bretagne...
Cet homme est une énigme. En quarante ans de vie militante, menée au pas de course, Michel Rocard n'a cessé de brouiller les pistes : naïf et calculateur, timide et provocant, idéaliste et briseur de rêves, fragile mais jamais abattu, pressé mais jouant le long terme, il a plusieurs profils, comme dans un tableau de Picasso. Quel est son vrai visage ? Qu'y-a-t-il de commun entre le jeune bourgeois social-démocrate qui choisit la vieille SFIO à vingt ans, le militant anti-colonialiste des années 60 qui travaille avec Pierre Mendès France, le révolutionnaire de Mai 68 qui veut implanter des comités populaires dans les usines et les universités, le gauchiste du PSU qui rêve de terrasser le capitalisme, le réformiste du PS qui s'oppose à François Mitterrand au nom du réalisme économique ? Robert Schneider, qui a reconstitué le puzzle, présente la première grande biographie de celui qui reste, à cinquante-sept ans, l'inconnu le plus célèbre et le plus populaire de France. Grâce à des témoignages et à des documents inédits, l'auteur découvre les ressorts cachés de l'homme, sa vie privée et son action. Il révèle les dessous des grands moments d'une carrière contrastée. Et éclaire l'avenir, en donnant des clés qui permettent de mieux comprendre les rapports complexes entre Michel Rocard et François Mitterrand.
À l'heure où il est de bon ton de prédire la décadence de l'Europe, le glissement du centre de gravité du monde vers le Pacifique et le déclin de l'Occident, l'auteur de... Et demain l'Afrique prend le contrepied de ces thèses. S'appuyant sur une démonstration rigoureuse, Edem Kodjo fait valoir que l'Occident, loin de décliner, se restructure pour faire face aux problèmes de demain. L'Amérique du Nord, l'Europe occidentale, malgré leurs difficultés, sont appelées à se renforcer. La concurrence du Japon et des nouveaux pays industrialisés, si elle est redoutable, n'entame pas encore la prééminence stratégique de l'Occident. Grâce à ses réseaux commerciaux, diplomatiques, culturels, celui-ci contrôle, en grande partie, l'évolution politique et économique de la planète. L'Occident entend surmonter son handicap démographique et neutraliser le bloc soviétique en négociant au besoin avec l'URSS. Loin de baisser la garde, il continue de lancer au reste du monde un triple défi politique, économique, technologique. En Asie, de profonds changements peuvent bouleverser l'ordre international établi. L'Amérique latine se cherche. L'islam est éclaté en différentes tendances, l'Afrique balbutie. L'avenir de l'Occident ? Tendre une main fraternelle aux pays démunis, faire évoluer le Sud au lieu de se l'aliéner. L'espoir, c'est la solidarité. Un regard original et lucide sur les réalités de notre temps, un grand livre prophétique.
En décembre 1992, une jeune femme débarque à l'aéroport de Roissy-en-France. Elle est sans papiers, ne parle pas le français et demande l'asile. Ouvrière du tiers monde, elle est en quête de nouveaux horizons et de libertés accrues. Sonia Nuñez Pineda vient de République dominicaine, l'autre moitié avec Haïti de cette île où Christophe Colomb créa la première colonie européenne du Nouveau Monde. Cinq siècles après, elle refait le voyage en sens inverse, frappant à la porte de cette Europe, aujourd'hui de plus en plus fermée aux étrangers, en lui renvoyant l'écho de ses anciennes curiosités où l'Autre était objet de convoitise, de découverte et de conquête. Sonia, c'est Anne Tristan qui, en ces temps d'ethnies purifiées et d'immigrés refoulés, de nationalismes et d'intégrismes renaissants, a choisi de passer du côté des clandestins, des réprouvés et des exclus. Après avoir cherché son personnage entre Santo Domingo et Port-au-Prince, elle a vécu l'ordinaire condition des passeurs de frontières, entre ruses et brimades, espoirs et humiliations, hors du temps et du droit. Explorant ces zones grises derrière lesquelles se barricade une France indifférente, elle croise une humanité en perpétuel mouvement, toutes identités mêlées, rebelle aux enfermements et avide de courants d'air. Récit pudique, à l'écriture sobre et retenue, d'un voyage là où les Français ne vont jamais, Clandestine est un éloge de l'hospitalité, de la rencontre et de l'accueil. Une façon de dire non à ceux qui dressent de nouveaux murs entre les hommes.
L'histoire du socialisme et une exploration des orientations qu'il peut prendre en maints domaines et en toutes régions, en secouant des syndicats et des partis souvent banalisés et parfois moribonds.
Le 21 mai 1996, le GIA annonce l'exécution des sept moines de Tibhirine enlevés deux mois plus tôt. Le 1er août suivant, l'évêque d'Oran, Pierre Claverie, est assassiné. Dix-neuf religieux chrétiens ont été tués en Algérie depuis le début de la tragédie. Bouleversé par le sacrifice de ces hommes et de ces femmes qui ont tout donné à Dieu et à l'Algérie, Jean-Luc Barré a voulu comprendre le sens de la présence, ancienne et durable dans ce pays, d'une Église qui n'y occupe plus aujourd'hui qu'une place réduite. Parti à la rencontre de leur espérance, il s'est rendu auprès de ce qui subsiste de communauté chrétienne à Alger. À travers le récit de ce qu'il appelle un voyage intérieur, qui est aussi un reportage sur le drame algérien, il nous livre son témoignage sur l'oeuvre de fraternité et d'amour, engagée à perte de vie par ces hommes de silence. En suivant le parcours, souvent difficile et heurté, de personnages exceptionnels, comme le cardinal Duval, Pierre Claverie ou Christian de Chergé, le prieur de Tibhirine, il montre leur prise de conscience du nécessaire dialogue avec les musulmans, où gît l'espoir qui, seul, peut répondre au fanatisme et à la violence. L'espoir en une humanité plurielle, fondée sur le respect des différences. L'espoir fraternel, pour lequel ces hommes et ces femmes ont vécu, et accepté par avance de mourir.
Péril sur la Chiraquie... Depuis presque deux décennies, faux facturiers et affairistes ont proliféré à la mairie de Paris et au Conseil régional de l'Île-de-France. Dans cette mise en coupe réglée, le pactole de centaines de millions détournés, ceux utilisés pour le financement politique, le dispute à la mesquinerie des grappillages de tel ou tel élu. C'est le racket des marchés publics, les prébendes de la famille Tibéri, les HLM de luxe des uns, les somptueuses résidences secondaires des autres, entretenues aux frais du contribuable... Et même des falsifications de listes électorales, destinées à assurer la victoire de la majorité chiraquienne à l'Hôtel de Ville. Dans La Razzia, Alain Guédé et Hervé Liffran décrivaient les premiers éléments d'un système de fausses factures centré sur la mairie de Paris. Aujourd'hui, les juges n'ont jamais été si près de la vérité. Ils n'en sont que plus dangereux pour un pouvoir qui prend, désormais, tous les risques pour les bâillonner. Et l'Élysée veille directement au silence des Chiraquiens, qui ne se reconnaissent plus dans cette Chiraquie-là : Claude-Annick Tissot, la Madame Propre de la région Île-de-France, en a fait l'amère expérience. Fluctuat nec mergitur - elle flotte mais ne coule pas - proclame la devise de la Ville de Paris. En cette fin d'année 1996, de nouvelles voies d'eau s'ouvrent dans la coque. Et le naufrage du navire municipal menace celui qui en fut, dix-huit ans durant, le capitaine.
Un mode de vie dans lequel l'objectif n'est pas l'enrichissement personnel. Dans lequel l'individu n'a pas à consacrer ses forces et ses moyens à assurer sa survie. Où l'on s'efforce de réduire les inégalités et les injustices résultant de la vie en société. Où les rapports sont fondés sur la coopération et non la concurrence. Utopie ? Rêve ? Illusion ? Non. 260 kibboutzim regroupant 118 000 personnes, soit 3,66 % de la population du pays, c'est une des réalités bien vivantes d'Israël aujourd'hui. À toutes les questions qu'on peut se poser sur le kibboutz, David Catarivas répond dans ce livre.
Fin novembre 1997, je me suis rendue dans quatre des sept villes des territoires occupés, devenues autonomes par application des accords d'Oslo. En sillonnant les routes de Jérusalem au Jourdain, et de Naplouse à Gaza, en écoutant des témoignages, plus tard en relisant l'histoire de ce pays, j'ai découvert une réalité que je m'étais employée à nier depuis toujours, et j'ai compris qu'il était temps d'en finir avec un aveuglement consenti. Petit à petit, je voyais s'effondrer, non sans douleur et sans déchirement, un système d'affirmations rassurantes, répétées, et souvent légitimes - l'audace du peuple juif, la nécessité de sa sécurité. Et, derrière elles, se profiler l'existence d'un peuple, le peuple palestinien, de sa terre - terre ancienne, habitée, nourrie de cultures, de religions, d'influences arabes, chrétiennes, juives. La cause palestinienne a été trop souvent le prétexte, ou l'alibi, d'un retour de la judéophobie. Mais l'indispensable mémoire de l'Holocauste aurait-elle jamais dû servir à masquer les épreuves subies, depuis des dizaines d'années, par le peuple palestinien, et à justifier la politique menée par Israël dans la partie occupée de la Palestine ?
Plongée dans l'univers mental helvétique, à l'heure où la Suisse traverse sa plus grave crise d'identité depuis la Seconde Guerre mondiale, Le mal suisse explore le sens d'une neutralité largement fictive et les effets pervers du consensus. Surtout, il tente de comprendre le ressort quasi paranoïaque de l'isolationnisme helvétique et de ce système unique de défense qui faisait dire au Conseil fédéral, en 1988 : La Suisse n'a pas d'armée, elle est une armée. Comment se défaire de cette obsession, dès lors qu'elle constitue le meilleur ciment d'une nation à l'identité floue, fragmentée par les divisions cantonales, linguistiques, culturelles et religieuses ? Que faire de cet héritage psychologique de méfiance par rapport au monde, quand la Suisse est montrée du doigt par les États-Unis pour son rôle durant la guerre, que la démocratie directe et le consensus bloquent les rouages de la machine gouvernementale, que sa population rejette l'adhésion à l'Espace économique européen, comme aux Nations Unies, que le chômage, jadis inconnu, progresse, et que les disparités sociales s'accroissent ? Le mal suisse est, certes, un examen sans concession de l'effondrement d'un mode de pensée et d'un mode de vie. Mais avec le souhait de contribuer à ce que la Suisse sorte de la mythologie façonnée par ses élites elles-mêmes, pour pénétrer enfin dans l'Histoire.
Jacques Chirac ? Pour certains, un impulsif impénitent, spécialiste des volte-face - voire des tête-à-queue. Une sorte de hussard qui ne se plaît qu'à la furia des assauts, mais à qui cette fougue même interdit de mener à bien tout projet de longue haleine. Pour d'autres, un perpétuel hésitant, un homme à l'identité incertaine et aux convictions floues, et donc soumis aux influences de ses entourages successifs. Analyses différentes mais conclusion identique : une inaptitude radicale aux stratégies longuement méditées, minutieusement réalisées. Puis il y eut ce jour de mai 1995, où stéréotypes et lieux communs durent faire place à l'évidence : Jacques Chirac, élu président de la République, avait bel et bien atteint son but. Deux ans pour se convaincre que les clichés avaient tort. Et deux mois - d'avril à juin 1997, le temps d'une dissolution-catastrophe - pour de nouveau penser qu'ils avaient peut-être raison. Du palais élyséen où désormais il réside plus qu'il ne préside, que nous réserve celui qui est chargé - rien de moins - de nous conduire dans un Nouveau Monde à l'orée d'un nouveau siècle ? S'il pose aujourd'hui un problème au pays, comment ce dernier peut-il le résoudre ? Pour esquisser des réponses à quelques-unes de ces questions, il m'a paru nécessaire de retracer son parcours. Afin, à travers son passé, de tenter d'éclairer notre avenir.
La Fayette, nous voilà ! Depuis la guerre d'Indépendance américaine, les relations entre les États-Unis et la France sont passées par bien des vicissitudes. En cette fin de siècle, la rivalité entre nos deux pays atteint des sommets, et les malentendus paraissent de plus en plus profonds. Les agacements mutuels, les procès d'intention, les guerres commerciales, se nourrissent d'incidents de plus en plus fréquents. Depuis la fin de la guerre froide, les nouveaux terrains d'affrontements se retrouvent dans la diplomatie, les armées, les grandes entreprises. À Washington, on peint les Français comme des alliés, sans doute, mais si inconstants et indociles, si arrogants et si imprévisibles, qu'il en devient insupportable d'envisager des initiatives communes ou des coopérations. À Paris, on fustige la morgue américaine et le caporalisme des élites politiques ou économiques d'outre-Atlantique - sur fond de naissance de l'Europe unie, de technologies de l'information omniprésentes, de compétitions farouches dans le commerce ou la culture. Sans que l'on sache comment ces deux grandes démocraties sortiront de cette crise qui les voit s'affronter sur tous les terrains, la France et les États-Unis sont devenus les pires amis du monde !
Une vocation : l'État ; une carrière : les affaires. On appelle cela le pantouflage. Entendez le passage d'un poste de haut fonctionnaire, à un emploi non moins élevé dans une entreprise privée, publique ou semi-publique. Ceux qui n'ont pas encore sauté le pas prononcent le mot avec gourmandise : celui-ci roule dans leur bouche, comme l'annonce d'une volupté promise. Un péché qu'on se pardonne déjà. Le rêve de travailler dans le privé, se substitue au désir de servir l'État, dont la vanité se révèle tristement d'année en année. Aux yeux du citoyen, le pantoufleur n'est qu'un pantouflard, un déserteur en somme, un personnage indélicat qui fait fi de ses engagements, et qui préfère une opulence confortable, même difficile, à l'austérité du service, même tranquille. Pratique douteuse, voire scandaleuse ou sortie de secours des énarques qui vivent mal le déclin du prestige de l'État ? La désertion a-t-elle un prix ? Le procès qu'on leur fait est-il juste ? Le découvrir est bien le but de ce voyage au pays des pantoufleurs.
Le 6 février 1998, le préfet de Corse, Claude Érignac, est abattu de trois balles tirées à bout portant, en pleine rue à Ajaccio. Le 6 mai 1999, en pleine affaire des paillotes, son successeur, le préfet Bernard Bonnet, est incarcéré. À deux reprises, l'État est bafoué comme il ne l'a jamais été auparavant. Que s'est-il passé pendant ces quinze mois ? Qui sont ces militants nationalistes qui ont tué le préfet Érignac ? Comment le champion de l'État de droit, le préfet Bonnet, a-t-il pu chuter aussi durement, au point de terminer son séjour en prison ? Rarement l'État aura paru aussi impuissant à gérer la question corse. Rarement, un gouvernement aura autant manqué de vision, d'imagination et de projet politique. En retraçant avec précision le cours de cette période mouvementée qui a embrasé les relations entre l'État et la Corse, le présent ouvrage analyse cette société complexe et pose la question de son avenir.
Masque passif, presque pathétique de Slobodan Milosevic, masque résolu de Bill Clinton, masque compréhensif de Jacques Chirac, masque résigné des réfugiés du Kosovo, masque insouciant des jeunes de Belgrade, masque outragé de la diaspora serbe, masque froid et souriant des pilotes de chasse, masque secret du diplomate... Dans cette danse macabre, qui a pour scène un tout petit pays d'une Europe presque oubliée, chaque acteur s'est vu affublé d'un masque, comme dans une tragédie grecque. Comment comprendre alors ce conflit, qui a pris une tournure indéchiffrable, que penser du Kosovo, si on est incapable de savoir qui agit et qui est responsable ? Pour devenir juge de son histoire, n'est-il pas temps de faire tomber les masques ?