Un hommage à l'esprit de résistance jivaro contre toute politique d'assimilation.
On les appelle Jivaros. Ils préfèrent se dénommer Achuar, les Gens du Palmier d'eau. Isolés dans la jungle de Haute-Amazonie, aux confins de l'Equateur et du Pérou, cette tribu légendaire fut protégée durant des siècles de l'incursion des Blancs par son inquiétante réputation de chasseurs de têtes. Plus qu'une condition de leur indépendance, la guerre est pour ces Indiens une vertu cardinale ; elle donne du prestige, renforce la solidarité, raffermit l'identité ethnique et permet le renouvellement rituel des âmes. Grâce à elle, les Achuar sont encore plusieurs milliers, fiers de leurs traditions et farouchement attachés à leur mode de vie. Ce livre est une chronique de leur découverte et un hommage à leur résistance.
L'auteur y relate au quotidien les étapes d'une intimité affective et intellectuelle croissante avec ce peuple dont il a partagé l'existence pendant près de trois années comme anthropologue. Tableau des temps ordinaires comme des événements tragiques, ce récit évoque aussi un apprentissage initiatique mené à l'écoute des mythes et des chants magiques, de l'interprétation des rêves et de l'enseignement des chamans. Une pensée riche et poétique s'en dégage, bouleversant nos conceptions de la connaissance, du sentiment religieux et des rapports à la nature. Des fondements de la violence collective à la logique de la sorcellerie, des principes de l'autorité politique à la définition de l'identité culturelle, de la philosophie de l'échange à l'intelligence de l'environnement, ce témoignage exceptionnel sur une manière libre, et presque oubliée, de vivre la condition humaine tire d'une expérience singulière un enseignement pour le temps présent.
Considéré comme un des grands anthropologues français du XXe siècle, Philippe Descola réalise son premier terrain en Amazonie. En ethnographe, il vit des années durant au sein de la tribu des Jivaros Achuar, et observe les relations que ces Amérindiens entretiennent avec les êtres de la nature. En ethnologue, il montre que l'opposition traditionnellement établie en Occident entre nature et culture ne se vérifie pas chez les Achuar, qui attribuent des caractéristiques humaines à la nature. En anthropologue enfin, il définit quatre modes de rapport au monde que sont le totémisme, l'animisme, le naturalisme et l'analogisme permettant de rendre compte des relations de l'homme à son environnement.
En un texte clair et didactique, Philippe Descola nous restitue les grandes étapes de son parcours et nous introduit de manière vivante à la pratique de l'anthropologie et à une " écologie des relations ".