« Nous ne sommes qu'un, acharné à rendre droit ce
qui ne demande que cela. Le silence additionné à la
quête d'exprimer l'inexprimable. C'est la gouache
qui connaît le chemin, qui se fait plus que je ne la
fais. Elle soulève des mystères, elle dévoile des formes
inédites, elle prend tournure, elle s'impose au point
d'éliminer tout geste supplémentaire. L'écriture n'est
jamais loin du poignet de celle qui peint. Toujours le
noir et le blanc. [...] Avec des pinceaux extrêmement
fi ns, comme des plumes. On n'attend rien, on se
laisse faire, on jubile à la montée d'une apparence,
on voit qu'elles sont solidaires et actives dans la
construction d'un dessin autonome toujours prêt à
accueillir d'autres apparences. » A. C.
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"On n'écrit pas pareil quand on est orphelin."
La mort de son père inaugure chez Annie Cohen une période de grand trouble. Elle décide de rompre avec sa géographie personnelle et de s'installer définitivement en Corse, en compagnie de Fra, son mari cinéaste, et de Rita, "la plus exquise des petites chiennes". Parenthèse heureuse, vite submergée par la vague de la dépression. Désormais une seule chose l'obsède : "Tout flamber!", "Taper" dans l'héritage de son père pour meubler leur splendide appartement loué sur un coup de tête.
"Et mes goûts de luxe ! De folie ! Car nous ne sommes pas allés chez But, Bricorama, Conforama, Leroy Merlin, Géant Casino pour meubler cet appartement ! Non ! Nous avons mis la barre très haut ! Les plus beaux magasins de la ville ! Plus dingue, plus cher, on ne trouve pas ! Un lit capitonné rouge au matelas de rêve, une table et un buffet en céramique noire, folie des folies, hors de prix, un canapé avec méridienne pour richards. Un équipement complet de cuisine, four à pyrolyse, machines à laver le linge et la vaisselle, frigo énorme, et le plus adorable des petits fers à repasser. Je n'avais qu'une seule consigne : prendre tout ce que j'aime, sans aucune restriction. Il aurait fallu une baffe, une gifle pour me faire revenir sur terre. Trop tard. Foutu ! Lâché ! Tout avait lâché !"
Le retour en catastrophe à Paris, un passage à Sainte-Anne, la mort de Rita marquent la fin d'un cycle.
Dans son théâtre intime, Annie Cohen met en scène de façon saisissante ce voyage au bout de l'addiction. Une "comédie", parfois tragique, souvent irrésistiblement drôle, comme s'il lui avait fallu vivre l'excès pour retrouver l'ascèse de l'écriture.
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Après l'enterrement de Sartre, en avril 1980, on eut l'impression que la France venait d'enterrer Victor Hugo pour la deuxième fois. Puis son oeuvre s'embarqua dans une étrange aventure, faite de bonheurs et de malheurs, selon les pays et selon les époques. Dans cet essai, Annie Cohen-Solal porte sur cette pensée en mouvement un regard nouveau, nourri de ses voyages à travers le monde et des lectures auxquelles il lui a été donné d'assister. Car, pendant qu'en France on s'amusait à chercher des poux dans la tête de Socrate, les hommes en provenance d'Europe, d'Afrique, d'Asie, d'Océanie, des deux Amériques s'accordaient sur un point : le message de Sartre restait, aux yeux de leurs intellectuels, un outil de référence pour déchiffrer leur époque.
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